- Apr 2020
-
journals.openedition.org journals.openedition.org
-
Anxiété, dépression et addiction liées à la communication numérique
La thèse des auteurs est que la communication numérique induit des dangers d'anxiété, de dépression et d'addiction ("comportementale")
-
Les technologies mobiles sont devenues des entités faisant si intimement partie de nous qu’elles représenteraient une extension de notre corps physique
Pour la première fois de l'article les auteurs évoquent de façon assez direct que les technologies mobiles feraient partie de notre intimité, comme faisant "partie de nous". Si la thèse qui consiste à dire que les technologie numérique génèrent certains affects négatifs est vraie, et qu'elles sont en train de devenir une partie de nous, nous évoluons vers une version toujours moins heureuse et épanouie de l'humanité connectée.
-
il serait intéressant d’étudier la possible fonction de la communication numérique conduisant à combler par des artefacts un « vide existentiel » chez les gros utilisateurs.
Crise existentielle comme raison d'excès d'utilisation des technologie de communication ? L'inverse est possible aussi.
-
Comme l’enfant séparé de sa mère trouve dans son « doudou » un moyen de se rassurer, le smartphone, objet transitionnel, ne permettrait-il pas de lutter contre les frustrations et affects négatifs provoqués par le monde social ?
Infantilisation du mobinaute. Internet comme refuge pour se protéger du vilain monde réel.
-
amplifiés par une société toujours plus individualiste et ambivalente.
Ou l'inverse…
-
D’abord, il nous semble que la communication numérique offre la possibilité de combler de nombreux besoins existentiels, narcissiques et sociaux, difficiles à satisfaire dans les phénomènes hors ligne.
Est ce uniquement les technologies numériques qui créent ces "nouveaux besoins"? Ou sont elles simplement un rouage, un vecteur, du monde moderne qui poussent au narcissisme à travers son organisation économique, son système scolaire etc. Les technologies numériques ne seraient alors qu'un amplificateur et non une cause directe.
-
dans une logique davantage interactionniste, systémique et circulaire.
Les auteurs énoncent des pistes évidentes pour parfaire la recherche sur le sujet mais n'exposent pas de méthodologie concrète. Ils semblent proposer une perspective qu'ils savent impossible à réaliser pour des raisons logistiques et/ou éthiques.
-
Dans la littérature, la majorité des recherches mettent essentiellement en évidence des corrélations, assez limitées sur le plan épistémologique.
Alors pourquoi induire régulièrement un lien de causalité plus haut ?
-
En effet, une pratique intensive du multitâche médiatique est associée à des symptômes dépressifs, de l’anxiété sociale (Becker et al., 2013) et, chez les adolescents, à un accroissement de l’impulsivité (Cain et al., 2016).
Encore une fois, il y a association mais il n'est pas établi de lien de causalité.
-
Une utilisation excessive du smartphone est souvent associée à des « hallucinations » sonores et à des perceptions de « signaux fantômes » en provenance du téléphone.
Peut on parler d'effet affectif ?
-
Plus de la moitié des mobinautes ont déclaré éprouver de l’anxiété en cas de perte de leur smartphone mais également quand ils ne pouvaient pas l’utiliser à cause d’une mauvaise couverture réseau ou d’une batterie faible
La genèse d'anxiété et de peur due à une perte d'accès aux technologies numériques appuie la thèse des auteurs.
-
En 2015, 59 % des Français consultaient leur mobile dans l’heure suivant leur réveil pour prendre connaissance de messages13. Un sur trois consultait même ses SMS la nuit… Le smartphone revêt une telle importance pour certains mobinautes qu’ils en sont devenus « dépendants », dans un sens très proche de celui dont nous avons déjà parlé pour Internet.
Avec de tels chiffres on se sent obligé d'adhérer au concept d'addiction au smartphone. Mais s'il est précisé que les chiffres différent d'un pays à l'autre, l'impact reste toujours fort avec toujours plus d'un tiers des individus touchés.
-
Au-delà de cette gêne, dans la littérature, cinq types de troubles associés à des affects négatifs concernent le smartphone. Examinons-les.
On change d'échelle, on passe des technologies de communication au sens large au smartphone. Avec l'idée forte qu'il en est le principal vecteur.
-
Cette impression génère des affects négatifs. Si les socionautes les plus actifs continuent à aller sur Facebook, c’est, selon Sagioglou et Greitemeyer (2014, p. 359), parce qu’ils ont tendance à faire une « erreur de prévision affective » : ils espèrent toujours se sentir mieux après avoir utilisé Facebook alors que, dans les faits, c’est souvent l’inverse qui se produit.
Cette impression est lié à de nombreuses activités oisives, elle n'est pas propre aux technologies de communication.
-
Selon Utz, Tanis et Vermeulen (2012), qui ont étudié un grand nombre de besoins et motivations psychosociaux conduisant à une forte activité sur les RSN (besoin d’appartenance sociale, estime de soi, vanité, sentiment ressenti par l’individu selon lequel « tout lui est dû »), c’est le besoin de popularité qui en est le prédicteur le plus puissant et le plus constant. Variable individuelle stable, il s’agit du besoin d’être aimé et reconnu par le plus grand nombre. Pour satisfaire ce besoin, les personnes sont motivées à se conformer à la pression de leurs pairs (Santor, 2000) et à adopter des comportements qui donnent l’impression qu’elles sont effectivement « populaires » (e.g. choix très soigneux de la photo de profil, descriptions de soi valorisantes) (Utz et al., 2012). Ces derniers auteurs estiment que les RSN sont un espace d’expression idéal pour les internautes ayant un fort besoin de popularité car ils permettent de s’exposer facilement au plus grand nombre et facilitent la mise en œuvre de stratégies autocentrées de présentation de soi (e.g. amélioration de son profil pour donner l’impression d’être populaire, révélation sur soi…) tout en communiquant avec les autres. Les personnes déjà populaires hors ligne et avec une haute estime de soi cherchent et parviennent souvent à avoir une certaine popularité sur les RSN. Mais gagner en popularité peut aussi être possible pour les personnes ayant une faible estime de soi et qui se considèrent comme impopulaires hors ligne. Un mécanisme de compensation sociale se met alors en place les conduisant à rechercher à être plus populaires sur les RSN (Zywica, Danowski, 2008). Sans doute est-ce leur impopularité hors ligne, source de frustration et d’émotions négatives qui les incite à retourner fréquemment sur les RSN pour gagner toujours davantage de popularité en ligne, avec le risque toutefois d’enclencher le cercle vicieux dont nous avons déjà parlé.
Dans ce paragraphe les auteurs expliquent la popularité est le besoin au coeur de la forte activité sur les RSN. "Si on est populaire on veut l'être plus, si on ne l'est pas on veut le devenir". Comme dans beaucoup d'arguments de l'article, on voit s'établir un lien de corrélation , mais pas forcément de causalité.
-
Les recherches sur la FOMO et le biais de comparaison sociale étant relativement muettes sur leurs déterminants, c’est dans la littérature sur les motivations sous-tendant les usages numériques que nous avons trouvé des concepts permettant de mieux en comprendre les causes.
Il manque ici un peu de détails sur la méthode de déduction, pourquoi ces deux concepts et surtout, pourquoi pas d'autres ?
-
Les recherches sur la FOMO et le biais de comparaison sociale étant relativement muettes sur leurs déterminants, c’est dans la littérature sur les motivations sous-tendant les usages numériques que nous avons trouvé des concepts permettant de mieux en comprendre les causes
Ouverture de la partie où les auteurs annoncent que les déterminants du biais évoqué et la FOMO sont les besoins de popularité et de reconnaissance sociale.
-
Des recherches en neurosciences sociales montrent que même lorsque la comparaison sociale est en faveur du socionaute, celle-ci n’est pas systématiquement source de satisfaction. En effet, une comparaison sociale positive activerait une zone cérébrale dédiée aux plaisirs et bien-être, le noyau accumbens (Meshi et al., 2013). Cette zone est impliquée dans le circuit de la récompense et du plaisir. Elle est toutefois également activée lors des pratiques excessives des socionautes et on observe un phénomène d’habituation nécessitant de toujours remporter davantage de comparaisons sociales pour obtenir la même satisfaction.
Effets négatifs même en cas de comparaisons favorables.
-
Il est intéressant de voir que cette erreur dans la comparaison avec les « étrangers » en défaveur du socionaute est largement réduite, voire inexistante, dans le cas de comparaison avec des amis et connaissances dont il connaît la vie hors ligne et dont il sait qu’elle est bien moins attirante que l’image montrée sur les RSN.
Pondération de l'effet négatif du "biais de comparaisons sociales défavorables"
-
Ce biais conduit au déclenchement de certains processus psychopathologiques, comme des ruminations mentales, c’est-à-dire des ressassements incoercibles d’idées et de pensées affectivement négatives, qui peuvent être associées à ou produire des syndromes dépressifs
-
Le danger est de tomber sur des sites qui incitent à des comportements personnellement (e.g. toxicomanie) ou socialement risqués ou les incitant à adhérer à des idéologies dangereuses.
Conséquence extrapolée.
-
les dépressions liées à des usages intensifs des RSN, ne font pas uniquement courir aux préadolescents et adolescents des risques d’un plus grand isolement social dans lequel ils se trouvent souvent déjà. En effet, souffrir de troubles dépressifs en s’exposant excessivement à Internet est d’autant plus problématique que les adolescents, alors fragiles psychologiquement, pensent parfois trouver sur certains RSN, sites ou blogs, du réconfort psychologique. Le danger est de tomber sur des sites qui incitent à des comportements personnellement (e.g. toxicomanie) ou socialement risqués ou les incitant à adhérer à des idéologies dangereuses.
Argument teinté de pathos pour alerter sur le danger encore plus fort chez les plus "vulnérables". Champs lexical adéquat.
-
une association positive a même été mise en évidence entre l’usage de ce RSN et des symptômes de dépression
Argument d'association, mais pas de causalité.
-
Plus les gens sont actifs sur Facebook, sans forcément en être « addicts », et plus leur humeur est négative après les usages du RSN
Argument de causalité.
-
Cependant une littérature relativement récente s’est développée autour de ce que certains chercheurs nomment tout de même « addictions comportementales » à Internet (Griffith et al., 2016).
Ici commence une série d'arguments pour expliquer que même si on ne peut pas (encore ?) parler d'addiction à proprement parler, certains usages des technologies de communication en ont de plusieurs caractéristiques. La création de l'expression "addiction comportementales" permet d'être explicite tout en respectant le cadre sémantique.
-
L’addiction à Internet ne figure pas dans la dernière version du Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux (DSM 5 ; APA, 2015) manuel de référence internationale pour la plupart des psychiatres et psychologues. À l’excès, ces habitudes sont étiquetées « comportements excessifs », mais ne sont pas définies comme de véritables troubles mentaux en raison, actuellement, de l’insuffisance de données dans la littérature (DSM 5 ; APA, 2015, p. 571). On manque par exemple de preuves neurobiologiques souvent nécessaires pour définir une véritable addiction. Les examens cérébraux, réalisés par IRM, de personnes développant des symptômes de dépendance montrent que les gros consommateurs d’Internet développent des processus neurobiologiques commun avec les toxicomanes et avec les personnes souffrant de dépendances pathologiques reconnues, comme celle liée aux jeux. Dans tous ces cas, leurs « pratiques addictives » activent le même système amygdale-striatum, système lié à la génèse du plaisir dans le cerveau. Cependant, ils présentent aussi de nombreuses différences, notamment dans le fonctionnement du système cérébral de contrôle inhibiteur, celui qui permet d’inhiber, par la volonté, certains de nos comportements (Turel et al., 2014). L’inhibition semblerait plus facile pour Internet. On manque également d’études cliniques sur des critères comportementaux, comme le sevrage ou la rechute, pour véritablement parler de troubles addictifs pour Internet.
Dans ce paragraphe les auteurs expliquent que l'on ne peut pas parler officiellement d'addiction à internet en évoquant principalement des absence de preuves biologique. Cela constitue un argument de départ dont la thèse est que l'usage excessif d'internet n'est pas une addiction.
-
les habitudes fortes et déjà bien ancrées,
Cette caractéristique ne serait elle pas la conséquence des trois autres ? Les habitudes ne seraient-elles pas les conséquences de la disponibilité, l'attrait et l'accessibilité des technologies ? Aussi concernant l'argument des habitudes "déjà bien ancrées"; bien ancrées par rapport à quoi ? à quand ?
-
En effet, parmi les multiples besoins et désirs que nous avons au quotidien (manger, boire, dormir, fumer, avoir des contacts sociaux, besoin d’hygiène, faire du sport…), le désir d’utiliser les médias (consulter ses e-mails, surfer sur le Web, aller sur les RSN, regarder la télévision) est celui pour lequel notre capacité de résister serait la plus faible. Non seulement le désir d’utiliser les médias serait plus fort et plus fréquent dans une journée que, par exemple, le désir de tabac, mais il serait, en outre, plus difficile à contrôler que les désirs de manger ou d’avoir des activités sexuelles (voir figure 1).
Il manque l'évocation du panel de participants pour être tout à fait pertinent.
-
Ces conclusions ne sont pas étonnantes au regard des travaux de Hofmann et ses collègues (2012).
Mise en lien de causalité, l'un confirme logiquement l'autre.
-
L’étude The World Unplugged a demandé à un millier d’étudiants provenant d’une douzaine d’universités des cinq continents, de faire l’expérience de 24h de déconnexion médiatique (Moeller et al., 2012). Les résultats ont été univoques : une nette majorité d’étudiants a admis l’échec pur et simple de leurs efforts de déconnection. Beaucoup d’entre eux se sont alors auto-déclarés « addicts » aux médias et technologies de communication numérique.
La véracité est moyenne car malgré la diversité géographique et culturelle, l'âge et le contexte des sujets est restreint.
-
Qu’en disent les recherches scientifiques ? Quels effets affectifs négatifs provoquent les usages intensifs des technologies et contenus de communication numérique tels le smartphone, Internet ou les réseaux sociaux numériques (RSN) ?
Dans la façon de poser la problématique on voit bien que la question n'est pas de savoir s'il existe des effets affectifs négatifs, il y en a, il s'agit de savoir lesquels.
-