- Jul 2020
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D’abord, il nous semble que la communication numérique offre la possibilité de combler de nombreux besoins existentiels, narcissiques et sociaux, difficiles à satisfaire dans les phénomènes hors ligne. Ces derniers sont souvent générés ou amplifiés par une société toujours plus individualiste et ambivalente. D’un côté, elle génère de nouveaux besoins toujours plus narcissiques, auxquels adolescents et jeunes adultes sont si sensibles (e.g. le besoin de popularité) et, de l’autre côté, elle provoque nombre de frustrations. Comme l’enfant séparé de sa mère trouve dans son « doudou » un moyen de se rassurer, le smartphone, objet transitionnel, ne permettrait-il pas de lutter contre les frustrations et affects négatifs provoqués par le monde social ? En étant connecté en permanence à ses amis et en pouvant « se raccrocher » à des environnements en ligne familiers, comme sa page Facebook ou Instagram, le mobinaute, éloigné de son environnement familier, ne se sentirait-il pas alors davantage en sécurité affective, comme dans son foyer où il a ses repères et habitudes rassurant ? La connexion permanente, notamment aux RSN, l’assurerait qu’il appartient bien à des groupes sociaux. Une forte activité sur les RSN, ne lui donnerait-elle pas l’impression qu’il est un acteur socialement central et important ? De nouvelles recherches sont donc nécessaires pour mieux comprendre comment s’opère la formation de ces représentations et le rôle qu’elles jouent dans la communication numérique. 38Quelques autres pistes à creuser concernent les motivations poussant à l’usage des TIC. Si la connexion permanente permet de lutter contre la peur du mobinaute de rater quelque chose (FOMO) et d’être exclu socialement, elle peut également le rassurer sur sa popularité. Elle lui transmet instantanément, par les like, retweet et autres notifications, des signes de reconnaissance d’autrui contribuant à satisfaire des besoins personnels et sociaux de construction narcissique et identitaire via les interactions sociales numériques. Cependant, il serait intéressant d’étudier la possible fonction de la communication numérique conduisant à combler par des artefacts un « vide existentiel » chez les gros utilisateurs. Par exemple, il semblerait que la connexion permanente soit particulièrement appréciée parce qu’elle offre la possibilité de répondre immédiatement et en permanence à des besoins de stimulation et de divertissement à court terme lors des nombreux moments d’ennui ressentis par l’internaute souffrant d’un problème existentiel. Comment évolue alors cette carence en fonction, par exemple, de l’usage intensif des RSN ? 21 http://insights.fb.com/2016/02/08/the-multidevice-movement-teens-in-france-and-germany/, consulté l (...) 39Les technologies mobiles sont devenues des entités faisant si intimement partie de nous qu’elles représenteraient une extension de notre corps physique, « un cordon ombilical qui ancre l’infrastructure digitale de la société de l’information à nos corps » (Harkin, 2003, p. 16). D’ailleurs, un grand nombre d’adolescents considèrent leur smartphone comme leur « seconde peau »21. Plus les personnes ont la possibilité d’exercer un contrôle sur leurs biens matériels comme elles contrôlent leur corps, plus ces biens deviennent étroitement liés à leur soi. Consciemment ou non, ces biens matériels fabriquent alors un « soi augmenté » (Belk, 2013). Jusqu’à quel point l’incapacité d’utiliser le smartphone ou sa perte peuvent-elles être perçues comme une diminution angoissante du soi ? Cette diminution touche-t-elle la partie narcissique, sociale ou plus corporelle du soi ? Dans ce dernier cas, le smartphone pourrait-il être intégré dans le schéma du corps et traité par le cerveau comme étant incarné en lui (Clark, 2008) ? Autant de questions auxquelles de nouvelles recherches devront répondre.
Les auteurs réitèrent ici leur thèse selon laquelle la communication numérique amplifie les besoins existentiels et provoque des frustrations. Plus particulièrement, et sous forme réthorique ils posent les bases de leur thèse au sujet des RSN, qui selon eux, permettent aux individus de confirmer leur rôle et position sociale.
Les motivations citées précédemment (la FOMO, besoin de popularité et le biais de comparaison sociale) sont mentionnées de nouveau avec deux nouvelles pistes, l'effet compensateur des communications numériques envers le "vide existentiel" et l'effet de "soi augmenté" que les auteurs suggèrent comme continuation de leur recherche.
L'ouverture présentée ne prend pas en compte l'usage croissant du smartphone dans la vie de tous les jours et les implications de cette tendance quant à la dépendance et autres symptômes. Comment associer la fréquence d'usage au vide existentiel ou au besoin de popularité lorsque presque chaque tâche de la vie quotidienne requiert l'usage du smartphone ?
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Sur le plan méthodologique, il serait intéressant de mettre en œuvre davantage de recherches qui montrent des liens de causalités entre usages intensifs des technologies numériques et affects négatifs, en étudiant également les effets de médiation impliqués. Dans la littérature, la majorité des recherches mettent essentiellement en évidence des corrélations, assez limitées sur le plan épistémologique. Par exemple, il est possible que ce soit les personnes ayant préalablement des tendances dépressives qui passent ensuite beaucoup plus de temps que les autres sur les réseaux sociaux. Seules les méthodes expérimentales sont appropriées lorsqu’il s’agit de tester des hypothèses déterministes impliquant l’effet de variables sur d’autres avec le but d’établir des connaissances scientifiques réfutables, au sens de Popper (1975) (Courbet, 2013). Cependant développer des méthodologies expérimentales pour étudier des liens causaux est complexe dans ce domaine. Les raisons sont à la fois pratiques et éthiques. Pour les besoins d’une étude il semble en effet difficile de demander à des sujets expérimentaux de s’exposer intensivement aux réseaux sociaux au risque de provoquer chez eux un syndrome dépressif. 34Sur le plan théorique, les chercheurs trouveront un intérêt certain à articuler, d’une part, les théories expliquant les motivations, les besoins psychosociaux satisfaits par l’usage des technologies et certains contenus (souvent en amont des effets) avec, d’autre part, les théories expliquant les conséquences et effets affectifs provoqués par les usages intensifs des communications numériques. 35Sur le plan épistémologique, les recherches pourraient s’intéresser aux phénomènes dans leur complexité et dans une logique davantage interactionniste, systémique et circulaire. Complexité et logique systémique circulaire prendraient en considération à la fois, premièrement, les multiples déterminants individuels (traits de personnalité, personnalité particulière -e.g. de type évitante ou narcissique-, troubles préexistants comme l’anxiété, les symptômes dépressifs, les cognitions inadaptées -e.g. les comparaisons défavorables, les carences narcissiques…), contextuels (e.g. liés à la situation de communication, à ses enjeux…), technologiques (e.g. les propriétés et contraintes propres aux médias numériques), sémiotiques (e.g. à partir de quels éléments sémiotiques mis sur le profil d’autrui, photos, commentaires… se forment les comparaisons défavorables ?) et deuxièmement, les interactions complexes de l’ensemble de ces déterminants.
Les auteurs ayant clairement étayé diverses pistes qui pourraient mener à la reconnaissance de l'usage abusif des RSN comme addiction, soulignent cependant les limites et proposent des pistes pouvant permettent de continuer l'avancement de la recherche dans cette voie.
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Le smartphone est l’un des dispositifs numériques le plus souvent impliqué dans la pratique du multitâche médiatique19. Le multitâche médiatique renvoie à deux types de comportements. Premièrement, il s’agit de l’usage de plusieurs médias simultanément. Par exemple, en 2015, 46 % des 18-24 ans utilisent très souvent leur smartphone en regardant la télévision. Deuxièmement, c’est l’usage d’un média pendant la réalisation d’une activité non liée aux médias. Par exemple, 25 % des 25-34 ans consultent leur smartphone en marchant dans la rue et 23 % des 18-25 ans l’invitent à table20. 30Si cette pratique s’est banalisée ces dernières années, elle n’est pourtant pas anodine pour les mobinautes. En effet, une pratique intensive du multitâche médiatique est associée à des symptômes dépressifs, de l’anxiété sociale (Becker et al., 2013) et, chez les adolescents, à un accroissement de l’impulsivité (Cain et al., 2016).
Encore une fois, il semble réducteur de ne pas mentioner ici les demandes professionnelles et la nécessité d'utiliser le smartphone dans la vie quotidienne. A titre d'exemple, la consultation du smartphone en marchant peut-être due à l'utilisation de Google map. Cet argument n'est donc pas applicable qu'aux RSN mais à la fonction quasi-vitale du smartphone.
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Tanis et ses collègues avancent deux explications au phénomène d’hallucinations sonores. Premièrement, ces signaux proviennent d’une utilisation intensive du smartphone susceptible de provoquer des erreurs d’interprétation des autres bruits de l’entourage, et donc des hallucinations bénignes. Deuxièmement, le smartphone est devenu tellement important aux yeux des mobinautes qu’ils seraient à l’affût du moindre signal (Tanis et al., 2015).
L'explication des symptômes hallucinatoires sont abductifs mais logiques et plausibles. Le lien avec le besoin de popularité semble en revanche être distendu, qu'en est-il des travailleurs en veille, sous la pression d'un manager qui communique beaucoup avec ses employés ou encore d'une mère qui travaille et communique avec sa nounou ? Ne serait-ce pas des raisons fortes qui puissent expliquer ces symptômes hallucinatoires ?
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La nomophobie développe en partie ou en totalité les troubles observés dans les obsessions phobiques classiques, que l’on va retrouver chez les mobinautes, à des degrés plus ou moins marqués. Ainsi, la nomophobie est souvent associée à des pensées ruminatives plus ou moins envahissantes. Elle est accompagnée d’affects négatifs, qui vont de l’inconfort à la forte anxiété ou à la forte peur de ne pas avoir la possibilité d’utiliser son smartphone, conduisant alors à être potentiellement injoignable et déconnecté d’Internet (King et al., 2014). Elle est également associée à des compulsions, plus ou moins envahissantes et plus ou moins acceptées par le mobinaute, souvent des habitudes de vérification du smartphone, que la personne ne peut supprimer. En raison notamment de l’intensité de l’anxiété associée à ce trouble et de l’augmentation de sa fréquence dans la population, certains auteurs demandent à ce que la nomophobie soit intégrée dans le DSM (Bragazzi, Del Puente, 2014).
La nomophobie qui désigne la crainte de ne pas avoir son smartphone avec soi, est ici comparée aux obsessions phobiques classiques et défendue comme tel par les chercheurs cités qui demandent même à ce qu'elle soit ajoutée au DSM.
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En 2015, 59 % des Français consultaient leur mobile dans l’heure suivant leur réveil pour prendre connaissance de messages13. Un sur trois consultait même ses SMS la nuit… Le smartphone revêt une telle importance pour certains mobinautes qu’ils en sont devenus « dépendants », dans un sens très proche de celui dont nous avons déjà parlé pour Internet. Plusieurs enquêtes scientifiques ont montré que si cette dépendance est un phénomène touchant un grand nombre de pays, il existe des différences interpays : par exemple 38 % des étudiants seraient dépendants en Espagne et 67 % aux Émirats Arabes Unis (voir Khoury et al., 2017). Dans l’enquête scientifique Smart.Use14 (2016), 21,1 % des 12-18 ans en Belgique se sont déclarés « dépendants » au smartphone, 33,4 % non-dépendants et 45,5 % seraient dans un état intermédiaire. En France, chez les plus âgés, en 2016, deux tiers des moins de 35 ans se sentaient dépendants et plus d’un tiers des mobinautes, quel que soit leur âge, s’estimaient « accros » et incapables de s’en séparer15. Les recherches sur la dépendance au smartphone ont relativement peu avancé au regard de l’ampleur du phénomène en raison du manque d’outils d’objectivation du problème. Deux principales échelles disposant de bonnes qualités psychométriques permettent depuis peu de mesurer cette dépendance, qualifiée de véritable addiction par leurs auteurs : le « Smartphone Addiction Inventory » (SPAI, Lin and Chang, 2014) contenant 26 items et « l’échelle d’addiction au Smartphone » avec une version à 10 items pouvant être utilisée auprès d’adolescents (SAS-SV, Kwon et al., 2013). On s’attend donc à une avancée des connaissances sur ces phénomènes de dépendance au cours des prochaines années.
Si la méthode semble s'améliorer avec l'apparition de mesures psychométriques, l'argument dialectique montre ici que les chiffres ne sont pas encore convaincants. L'auteur souligne par ailleurs chercheurs cités utilisent le narratif de l'addiction ce qui va dans le sens de la thèse de l'article.
Comme mentionné dans le paragraphe précédent les chiffres il n'est fait aucune référence a l'usage professionnel et essentiel dans la vie de tous les jours du smartphone qui est une dimension bien plus large que celle des RSN.
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Le smartphone est devenu omniprésent dans le quotidien des Français : en 2015 près de 70 % d’entre eux en possédaient un9 et 58 % déclaraient l’avoir en permanence avec eux10, y compris la nuit. Le système d’interaction usager-mobile incite les mobinautes11 à mettre en place de fréquentes consultations de l’écran afin d’établir une veille des informations reçues, dont il est difficile de se défaire. Si ces habitudes ne sont pas des addictions au sens pathologique et si elles ne sont pas gênantes pour tous, nombre de mobinautes les trouvent tout de même embarrassantes au quotidien, tant ils se sentent « prisonniers » de cette habitude (Oulasvirta et al., 2012). Soixante-dix pourcent des français consultent leur smartphone toutes les 5 minutes Ainsi, un smartphone est actionné 221 fois par jour12. Pour certains, ces habitudes de vérification sont d’autant plus gênantes qu’elles sont susceptibles d’augmenter le temps d’utilisation globale du mobile. En effet, quand les mobinautes le vérifient, beaucoup sont tentés de l’utiliser plus longuement, pensant y trouver de petits plaisirs ou stimulations qui animent leur quotidien. Pourtant, au final, ils ont souvent l’impression d’avoir perdu du temps et fait des choses peu significatives. Au-delà de cette gêne, dans la littérature, cinq types de troubles associés à des affects négatifs concernent le smartphone. Examinons-les.
L'argument réthorique ici évoqué est celui de l'omniprésence du smartphone dans le quotidien. L'usage professionnel et pour les tâches essentielles du quotidien (réveil, appels et messages, vidéoconférence, calendrier, commandes sur internet...) surtout durant la période Covid 19, est cependant complètement omis alors qu'il a un rôle important à jouer dans la durée et fréquence d'usage qui ne peuvent être attribués qu'aux seuls RSN et activités de divertissement.
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es socionautes ont parfois l’impression de ne rien faire de significatif et de perdre du temps inutilement sur les RSN. De nombreuses vidéos y circulent, comme par exemple les célèbres vidéos de chats, objet d’une étude de Myrick (2015). Si les socionautes les trouvent divertissantes à court terme, ils sont susceptibles d’éprouver, au final, de la culpabilité liée, soit au fait qu’ils ont négligé d’autres tâches plus importantes à effectuer, soit aux sentiments négatifs proches de ceux ressentis lors de comportements de procrastination. Regarder des vidéos divertissantes provoque un plaisir coupable au sein d’une triple relation « procrastination-culpabilité-plaisir ». Plus globalement, la tendance à la procrastination issue de la fréquentation des RSN a des effets sur le bien-être des socionautes (Meier et al., 2016) 22Cette impression génère des affects négatifs. Si les socionautes les plus actifs continuent à aller sur Facebook, c’est, selon Sagioglou et Greitemeyer (2014, p. 359), parce qu’ils ont tendance à faire une « erreur de prévision affective » : ils espèrent toujours se sentir mieux après avoir utilisé Facebook alors que, dans les faits, c’est souvent l’inverse qui se produit.
L'argument réthorique de l'effet de la perte de temps est ici bien étayé de plusieurs idées soutenues par différentes recherches. La culpabilité, les effets de la procrastination sur le bien-être et l'erreur de prévision affective sont des éléments plausibles et logiques de l'usage des RSN.
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Illustrons ce processus avec les résultats d’une recherche empirique qualitative que nous avons réalisée sur les réactions des fans au décès de Michael Jackson (Fourquet-Courbet, Courbet, 2012). Nous avons montré que les RSN jouent un rôle ambivalent dans leur gestion du deuil. Si les RSN ont été psychologiquement utiles aux fans dans les premiers jours qui ont suivi le décès pour obtenir des informations et partager socialement leurs émotions, il semble toutefois qu’à plus long terme, leurs usages fréquents et prolongés ont freiné la résolution du deuil chez certains. Retourner fréquemment et pendant un long délai après le décès sur les RSN et pages de fans, comme l’ont fait de nombreux fans, conduit à régulièrement re-générer et ruminer des pensées négatives, à augmenter la fréquence et l’intensité des émotions négatives ressenties. Si communiquer et exprimer sa tristesse est nécessaire dans le premier stade du deuil, notamment pour obtenir empathie et soutien sociaux pour « faire son deuil », cette phase ne doit pas être trop longtemps entretenue. Or les RSN incitant à prolonger cette phase semblent ralentir la gestion du deuil (Courbet, Fourquet-Courbet, 2014). Certes, si les deuils sont heureusement rares dans la vie quotidienne, l’entretien des ruminations et émotions négatives peut se retrouver dans d’autres circonstances, par exemple, à la suite d’une séparation amoureuse. Des consultations fréquentes des pages de l’être aimé(e) perdu(e) sur les RSN pourraient empêcher d’accepter la fin de la relation.
Les auteurs citent pour la première fois leur propre recherche afin de nuancer le rôle des RSN dans la gestion du deuil. Si l'effet pratique à court terme peut être bénéfique, l'usage abusif sur le long terme conduit à des ruminations.
Par ailleurs les auteurs appliquent de façon inductive l'analyse faite de la situation du deuil à d'autres circonstances telles que celle de la séparation. Si l'argument est plausible, aucune recherche n'est cependant citée pour le soutenir.
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Une activité soutenue sur les RSN s’explique également par un fort besoin de reconnaissance sociale (Dang-Nguyen et al., 2015) que les socionautes n’ont pas forcément dans la vie hors ligne. Les RSN pourraient alors, de nouveau, agir comme un dispositif de compensation sociale. La volonté de satisfaire ce besoin incite d’abord les socionautes à rendre fortement visible leur image en ayant notamment le maximum de contacts. Ensuite, ils vont chercher de multiples signes de cette reconnaissance sociale. Meshi et ses collègues (2013) estiment que les like, tweet, partages et autres messages sont autant de signes de reconnaissance sociale et deviennent une véritable monnaie d’échange affectif entre personnes en contact.
L'argumentaire parait ici plus réthorique qu'épistémique. Le besoin de reconnaissance sociale est une continuation du besoin de popularité dans la logique de la comparaison sociale.
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Sans doute est-ce leur impopularité hors ligne, source de frustration et d’émotions négatives qui les incite à retourner fréquemment sur les RSN pour gagner toujours davantage de popularité en ligne, avec le risque toutefois d’enclencher le cercle vicieux dont nous avons déjà parlé.
Le narratif abductif semble peut convaincant ici. Si les recherches citées expliquent que le besoin de popularité est un prédicteur de l'usage des RSN, le lien de corrélation entre impopularité hors ligne et niveau d'usage est présumé.
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Les recherches sur la FOMO et le biais de comparaison sociale étant relativement muettes sur leurs déterminants, c’est dans la littérature sur les motivations sous-tendant les usages numériques que nous avons trouvé des concepts permettant de mieux en comprendre les causes. C’est le cas de la forte envie de satisfaire, via les RSN, deux besoins sociaux souvent non satisfaits dans la vie du socionaute : le besoin de popularité et le besoin de reconnaissance sociale.
Les auteurs appliquent les concepts du besoin de popularité et du besoin de reconnaissance sociale venant de la littérature sur les motivations à la FOMO et le biais de comparaison sociale afin d'en expliquer de façon plausible les déterminants.
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Récemment, des auteurs ont mis en évidence une peur très particulière chez les gros usagers des RSN : la FOMO (Fear Of Missing Out, voir Baker et al., 2016). Il s’agit de « la crainte envahissante que d’autres pourraient avoir des expériences enrichissantes desquelles nous serions absents […] » (Przybylski et al., 2013, p. 1841). Le socionaute a alors la volonté de rester en permanence connecté avec les autres. Cette peur le conduit à vouloir prendre connaissance au plus tôt des nouvelles informations qui circulent sur les RSN. Quand elle est élevée, la FOMO est souvent associée à une humeur très fréquemment négative, une faible satisfaction de sa vie en général et à plus de symptômes dépressifs (Baker et al., 2016). Des recherches récentes ont permis non seulement de concevoir des échelles psychométriques8 permettant de mesurer la FOMO (Przybylski et al., 2013), mais, en outre, de mieux comprendre ses corrélats neurobiologiques. Elle serait associée à l’activation d’une zone cérébrale spécifique : le gyrus temporal moyen droit (Lai et al., 2016). Ces derniers auteurs montrent que cette zone s’active uniquement lorsque les individus sont exposés à des images montrant des scènes d’inclusion sociale (e.g. scènes où des personnes s’amusent, rient avec leurs amis, leur famille ou leurs collègues, partageant des activités avec eux) (vs. d’exclusion sociale).
La recherche concernant la FOMO est particulièrement riche. Un lien de causalité a été mis en évidence entre FOMO et symptômes dépressifs, une méthode psychométrique a été mise en place et une corrélation neurobiologique a été observée.
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D’une façon générale, les socionautes7 tendent à utiliser les RSN en y gérant stratégiquement leurs relations sociales, en travaillant leur présentation de soi, leur image sociale et les impressions que les autres se font d’eux (Krämer, Winter, 2008). Les RSN sont même devenus de véritables espaces de comparaison sociale entre soi et les autres (Haferkamp, Krämer, 2011). Cependant, les internautes qui les fréquentent intensivement ont davantage tendance à effectuer des comparaisons sociales dont les résultats sont en leur défaveur (Lee, 2014). Ils sont aussi enclins à penser que les autres sont plus heureux et ont une vie bien plus agréable que la leur, ce qui leur donne un sentiment d’injustice (Chou, Edge, 2012). Ce biais conduit au déclenchement de certains processus psychopathologiques, comme des ruminations mentales, c’est-à-dire des ressassements incoercibles d’idées et de pensées affectivement négatives, qui peuvent être associées à ou produire des syndromes dépressifs (Feinstein et al., 2013). 14Ce processus s’observe surtout quand les « amis » ne font pas partie de l’entourage social hors ligne du socionaute et sont donc des « étrangers ». Quand les socionautes suivent beaucoup de personnes qu’ils ne connaissent pas personnellement, comme dans le cas d’Instagram, un usage intense est associé à plus de symptômes dépressifs, médiés par une comparaison sociale négative (Lup et al., 2015). Les socionautes qui ont le plus d’amis « étrangers » sur Facebook estiment, par comparaison, que les autres ont une vie meilleure que la leur (Chou, Edge, 2012). Il est intéressant de voir que cette erreur dans la comparaison avec les « étrangers » en défaveur du socionaute est largement réduite, voire inexistante, dans le cas de comparaison avec des amis et connaissances dont il connaît la vie hors ligne et dont il sait qu’elle est bien moins attirante que l’image montrée sur les RSN. 15Des recherches en neurosciences sociales montrent que même lorsque la comparaison sociale est en faveur du socionaute, celle-ci n’est pas systématiquement source de satisfaction. En effet, une comparaison sociale positive activerait une zone cérébrale dédiée aux plaisirs et bien-être, le noyau accumbens (Meshi et al., 2013). Cette zone est impliquée dans le circuit de la récompense et du plaisir. Elle est toutefois également activée lors des pratiques excessives des socionautes et on observe un phénomène d’habituation nécessitant de toujours remporter davantage de comparaisons sociales pour obtenir la même satisfaction.
De nombreuses recherches sont énumérées en un enchaînement logique d'idées et semblent être en accord sur la dimension de comparaison sociale dans laquelle l'usage des RSN se situe. Les effets négatifs (ruminations mentales et syndromes dépressifs), les processus et effets aggravants (la présence de beaucoup "d'amis" étrangers) sont mis en évidence de façon causal par ces thèses.
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Si consulter Facebook est le premier geste du matin pour 48 % des 18-34 ans, l’usage des RSN, censés apporter divertissements et satisfaction, semble être l’objet d’un étonnant paradoxe. Plus les gens sont actifs sur Facebook, sans forcément en être « addicts », et plus leur humeur est négative après les usages du RSN (Sagioglou, Greitemeyer, 2014). La genèse de ces affects négatifs est bien liée à Facebook car ils n’apparaissent pas lors d’activités de durée similaire effectuées sur Internet en dehors de ce RSN. Cette constatation n’est pas uniquement liée à Facebook puisque des résultats similaires ont également été remarqués avec Instagram (Lup et al., 2015).
Selon une argumentation déductive basée sur les recherches de Sagioglou et Greitemeyer (2014) et Lup et al., (2015) les réseaux sociaux semblent être les principaux coupables des symptômes dépressifs.
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Cependant une littérature relativement récente s’est développée autour de ce que certains chercheurs nomment tout de même « addictions comportementales » à Internet (Griffith et al., 2016). Celles-ci peuvent être définies comme une habitude répétitive dont l’individu a du mal à se soustraire et qui accroît le risque de maladie et/ou est associée à des problèmes personnels ou sociaux. Elle est souvent ressentie négativement comme une perte de contrôle dans laquelle l’individu a conscience des risques psychologiques et sociaux. En simplifiant, il existe trois grands courants de recherche. Un courant portant sur les addictions sur (et non à) Internet. Il s’agit de la reproduction sur Internet d’un comportement addictif particulier que la personne effectue également en dehors du Web (addictions aux jeux, au sexe, aux achats… Billieux, 2012). 6 Dans cet article, nous faisons la distinction entre les phénomènes en ligne et hors ligne. Les prem (...) Un courant portant sur les addictions à Internet. Les internautes sont dépendants d’activités que l’on ne trouve que sur Internet, essentiellement l’usage des RSN (Griffiths et al., 2014). Ils se construisent, la plupart du temps, un « soi virtuel » bien différent de leur « soi réel ». L’écart entre les deux « sois » semble être un prédicteur de l’implication excessive dans leurs activités sur les RSN (Billieux et al., 2015). De nombreux travaux insistent sur les vulnérabilités psychosociales préexistantes chez les jeunes « addicts » : importante anxiété sociale, sentiment de solitude dans la vie sociale hors ligne6. Ils trouvent alors de forts attraits aux RSN. Cependant, il n’est pas rare de voir, chez les plus jeunes, un usage intensif d’Internet les amener à négliger leur travail scolaire, à entrer en conflits avec leurs parents… ce qui accroît leur anxiété. Le temps passé à surfer sur Internet est positivement associé aux symptômes de la dépression et à l’anxiété sociale chez les adolescents ayant un réseau amical de faible qualité. Plus le temps passé sur le web est élevé et plus leur bien-être est faible (Yang, Tung, 2007). En effet, si interagir avec les RSN peut créer une certaine satisfaction immédiate contribuant à accroître leur dépendance, les satisfactions à plus long terme et dans la vie sociale hors ligne sont quasi inexistantes. Les jeunes internautes entrent alors dans un cercle vicieux : ceux qui ont déjà peu d’amis passent plus de temps sur Internet ; l’excès de web et l’absence de vie sociale hors ligne développent, en retour, des problèmes de confiance de soi et d’anxiété (Selfhout et al., 2009). Un courant portant sur des modèles plus compensatoires, comme celui de « l’usage compensatoire de l’Internet » (Kardefelt-Winther, 2014). Les personnes vont sur le web pour échapper à leurs problèmes dans la vie hors ligne, à leur manque de stimulation sociale ou pour atténuer leur humeur dysphorique. Elles cherchent alors à se socialiser par Internet, par exemple dans les jeux en ligne ou sur les RSN. Dans certains cas, les résultats sont positifs car ces personnes se sentent effectivement mieux en obtenant les stimulations sociales désirées. Dans d’autres cas, les résultats sont négatifs dans la mesure où elles deviennent « dépendantes » du Web pour obtenir satisfactions et stimulations sociales. Cependant, de telles pratiques ne constituent pas une réelle dépendance au sens pathologique car elles ne sont pas de nature compulsive. Cette théorie explique notamment pourquoi certaines personnes continuent à passer autant de temps à surfer sur le web bien qu’elles considèrent ces expériences comme globalement négatives.
L'auteur expose ici le cadre général de réponse choisi. Certaines recherches récentes identifient l'usage abusif d'internet comme "addiction" en se basant sur trois axes: internet en tant que moyen d'assouvir d'autres addictions, internet en tant qu'objet d'addiction et internet en tant qu'objet compensatoire à d'autres problèmes de la vie réelle.
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Qu’en disent les recherches scientifiques ? Quels effets affectifs négatifs provoquent les usages intensifs des technologies et contenus de communication numérique tels le smartphone, Internet ou les réseaux sociaux numériques (RSN) ? Quels processus sous-tendent les effets et quels déterminants sont alors impliqués ?
Voici la problématique de cette analyse qui se lance pour défi d'identifier les processus et effets affectifs négatifs qui résultent de l'usage intensif des technologies de communication numérique en partant de la littérature scientifique existante.
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L’addiction à Internet ne figure pas dans la dernière version du Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux (DSM 5 ; APA, 2015) manuel de référence internationale pour la plupart des psychiatres et psychologues. À l’excès, ces habitudes sont étiquetées « comportements excessifs », mais ne sont pas définies comme de véritables troubles mentaux en raison, actuellement, de l’insuffisance de données dans la littérature (DSM 5 ; APA, 2015, p. 571). On manque par exemple de preuves neurobiologiques souvent nécessaires pour définir une véritable addiction. Les examens cérébraux, réalisés par IRM, de personnes développant des symptômes de dépendance montrent que les gros consommateurs d’Internet développent des processus neurobiologiques commun avec les toxicomanes et avec les personnes souffrant de dépendances pathologiques reconnues, comme celle liée aux jeux. Dans tous ces cas, leurs « pratiques addictives » activent le même système amygdale-striatum, système lié à la génèse du plaisir dans le cerveau. Cependant, ils présentent aussi de nombreuses différences, notamment dans le fonctionnement du système cérébral de contrôle inhibiteur, celui qui permet d’inhiber, par la volonté, certains de nos comportements (Turel et al., 2014). L’inhibition semblerait plus facile pour Internet. On manque également d’études cliniques sur des critères comportementaux, comme le sevrage ou la rechute, pour véritablement parler de troubles addictifs pour Internet.
L'état actuel de la recherche dans le domaine est limité. Si des examens IRM ont été réalisés, il n'y a pas d'études cliniques et de preuves neurobiologiques disponibles qui permettent de classifier l'addiction à internet comme un trouble mental. L'approche est ici dialectique avec une énumération de plusieurs résultats plus ou moins convaincants ainsi que leurs points forts et failles.
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Quatre caractéristiques des pratiques médiatico-numériques pourraient expliquer l’extrême difficulté à contrôler les désirs d’usage : les habitudes fortes et déjà bien ancrées, la disponibilité permanente des technologies, l’attrait considérable des activités pratiquées et le coût peu élevé pour les pratiquer. Si aller sur Internet est devenu une habitude, parfois excessive pour certains, peut-elle conduire à une dépendance ou à une addiction au sens pathologique du terme (LaRose 2010) ? Cette question est actuellement toujours débattue dans la littérature, depuis les travaux initiaux de Young (1996).
Voici une seconde question argumentative qui cherche à distinguer, au sein de la recherche naissante sur le sujet, si il y a consensus quant à la classification des conséquence de l'usage excessif comme dépendance ou addiction au sens pathologique du terme.
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L’étude The World Unplugged a demandé à un millier d’étudiants provenant d’une douzaine d’universités des cinq continents, de faire l’expérience de 24h de déconnexion médiatique (Moeller et al., 2012). Les résultats ont été univoques : une nette majorité d’étudiants a admis l’échec pur et simple de leurs efforts de déconnection. Beaucoup d’entre eux se sont alors auto-déclarés « addicts » aux médias et technologies de communication numérique. 6Ces conclusions ne sont pas étonnantes au regard des travaux de Hofmann et ses collègues (2012). En effet, parmi les multiples besoins et désirs que nous avons au quotidien (manger, boire, dormir, fumer, avoir des contacts sociaux, besoin d’hygiène, faire du sport…), le désir d’utiliser les médias (consulter ses e-mails, surfer sur le Web, aller sur les RSN, regarder la télévision) est celui pour lequel notre capacité de résister serait la plus faible. Non seulement le désir d’utiliser les médias serait plus fort et plus fréquent dans une journée que, par exemple, le désir de tabac, mais il serait, en outre, plus difficile à contrôler que les désirs de manger ou d’avoir des activités sexuelles (voir figure 1).
Argument épistémique inductif qui applique le résultat de la recherche de Hoffman et ses collègues afin d'expliquer l'échec de l'effort de déconnection des sujets de l'étude The World Unplugged. L'argument semble valide mais peu de détails sont apportés quand on conditions de l'étude et les raisons de l'échec par les étudiants. Enfin l'échec est "admis" par les étudiants, mais est-ce vraiment le résultat confirmé selon des critères d'évaluation pré-établis ?
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d’une part, des travaux sur les motivations individuelles conduisant à l’usage des technologies de communication numérique et, d’autre part, les travaux sur les effets des usages intensifs sur les adultes et adolescents.
Les auteurs ont décidé d'organiser leur synthèse autour de deux axes, celui des causes (motivations) et celui des effets. Reste à savoir si cette approche permet de résoudre le problème du manque de corrélation confirmée énoncé plus haut.
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il est difficile de différencier les recherches mettant en évidence des corrélations, de celles montrant des liens de causalités entre usages des technologies de communication numérique et affects négatifs ressentis par les gros utilisateurs.
Les auteurs identifient certaines limitations en terme d'évidence des corrélations entre usage des technologies et effets négatifs.
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Ce processus s’observe surtout quand les « amis » ne font pas partie de l’entourage social hors ligne du socionaute et sont donc des « étrangers ». Quand les socionautes suivent beaucoup de personnes qu’ils ne connaissent pas personnellement, comme dans le cas d’Instagram, un usage intense est associé à plus de symptômes dépressifs, médiés par une comparaison sociale négative (Lup et al., 2015). Les socionautes qui ont le plus d’amis « étrangers » sur Facebook estiment, par comparaison, que les autres ont une vie meilleure que la leur (Chou, Edge, 2012). Il est intéressant de voir que cette erreur dans la comparaison avec les « étrangers » en défaveur du socionaute est largement réduite, voire inexistante, dans le cas de comparaison avec des amis et connaissances dont il connaît la vie hors ligne et dont il sait qu’elle est bien moins attirante que l’image montrée sur les RSN.
L'argumentation continue ici de façon logique et basée sur un enchainement de liens causaux et souligne l'effet aggravateur de comparaison avec des étrangers pour les socionautes. L'argument est aussi dialectique avec des mentions de recherches soutenant la logique de l'auteur.
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D’une façon générale, les socionautes7 tendent à utiliser les RSN en y gérant stratégiquement leurs relations sociales, en travaillant leur présentation de soi, leur image sociale et les impressions que les autres se font d’eux (Krämer, Winter, 2008). Les RSN sont même devenus de véritables espaces de comparaison sociale entre soi et les autres (Haferkamp, Krämer, 2011). Cependant, les internautes qui les fréquentent intensivement ont davantage tendance à effectuer des comparaisons sociales dont les résultats sont en leur défaveur (Lee, 2014). Ils sont aussi enclins à penser que les autres sont plus heureux et ont une vie bien plus agréable que la leur, ce qui leur donne un sentiment d’injustice (Chou, Edge, 2012). Ce biais conduit au déclenchement de certains processus psychopathologiques, comme des ruminations mentales, c’est-à-dire des ressassements incoercibles d’idées et de pensées affectivement négatives, qui peuvent être associées à ou produire des syndromes dépressifs (Feinstein et al., 2013).
Argument epistemique deductif qui permet de conclure que le biais de comparaison conduit a l'apparition de symptomes psychologiques negatifs.
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Des recherches en neurosciences sociales montrent que même lorsque la comparaison sociale est en faveur du socionaute, celle-ci n’est pas systématiquement source de satisfaction. En effet, une comparaison sociale positive activerait une zone cérébrale dédiée aux plaisirs et bien-être, le noyau accumbens (Meshi et al., 2013). Cette zone est impliquée dans le circuit de la récompense et du plaisir. Elle est toutefois également activée lors des pratiques excessives des socionautes et on observe un phénomène d’habituation nécessitant de toujours remporter davantage de comparaisons sociales pour obtenir la même satisfaction.
Element important puisqu'il vient appuyer la thèse de l'auteur de façon dialectique en soulignant que même lorsque la comparaison sociale est en faveur du socio naute les effets négatifs souligne n'en est pas forcément moindres.
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Si consulter Facebook est le premier geste du matin pour 48 % des 18-34 ans, l’usage des RSN, censés apporter divertissements et satisfaction, semble être l’objet d’un étonnant paradoxe. Plus les gens sont actifs sur Facebook, sans forcément en être « addicts », et plus leur humeur est négative après les usages du RSN (Sagioglou, Greitemeyer, 2014). La genèse de ces affects négatifs est bien liée à Facebook car ils n’apparaissent pas lors d’activités de durée similaire effectuées sur Internet en dehors de ce RSN. Cette constatation n’est pas uniquement liée à Facebook puisque des résultats similaires ont également été remarqués avec Instagram (Lup et al., 2015). Plus grave, une association positive a même été mise en évidence entre l’usage de ce RSN et des symptômes de dépression. Les préadolescents et adolescents semblent particulièrement sensibles (O’Keeffe, Clarke-Pearson, 2011). En particulier, chez les adolescents qui perçoivent leur réseau amical hors ligne comme étant de faible qualité, les longues durées passées sur Facebook sont associées à davantage de troubles dépressifs et d’anxiété sociale (Selfhout et al., 2009). Selon O’Keeffe et Clarke-Pearson (2011), les dépressions liées à des usages intensifs des RSN, ne font pas uniquement courir aux préadolescents et adolescents des risques d’un plus grand isolement social dans lequel ils se trouvent souvent déjà. En effet, souffrir de troubles dépressifs en s’exposant excessivement à Internet est d’autant plus problématique que les adolescents, alors fragiles psychologiquement, pensent parfois trouver sur certains RSN, sites ou blogs, du réconfort psychologique. Le danger est de tomber sur des sites qui incitent à des comportements personnellement (e.g. toxicomanie) ou socialement risqués ou les incitant à adhérer à des idéologies dangereuses.
Si plusieurs études permettent de mettre en évidence une relation causale entre usages de certains RSN tels que Facebook et Instagram et certains symptômes dépressifs chez les adolescents, les hypothèses finales de ce paragraphe qui décrivent le comportement comme une recherche du réconfort psychologique ainsi que le rôle incitateur des RSN ne sont soutenus par aucune recherché ou argumentation.
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- Jun 2020
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journals.openedition.org journals.openedition.org
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Nous mettons systématiquement en évidence les principaux processus psychologiques et psychosociaux impliqués, les effets et déterminants majeurs des phénomènes. Pour conclure, nous proposons également quelques nouvelles hypothèses ainsi que de nouvelles perspectives de recherche qu’il nous semble prioritaire de mener sur ce thème en sciences de l’information et de la communication.
Plan de l'article établi avec une ouverture sur de nouvelles problématiques dans la conclusion.
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il est difficile de différencier les recherches mettant en évidence des corrélations, de celles montrant des liens de causalités entre usages des technologies de communication numérique et affects négatifs ressentis par les gros utilisateurs
On retrouve l'application d'une méthode de recherche scientifique et corrélationnelle qui laisse présager d'une certaine rigueur dans la sélection de recherches précédentes sur le sujet.
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Premièrement, plusieurs disciplines s’intéressent à ce domaine. Dans le présent article et dans une logique transdisciplinaire, nous avons synthétisé les récents travaux publiés dans des revues scientifiques à comité de lecture, essentiellement de langue anglaise, figurant dans les principales bases de données internationales (Psycinfo, Medline, Business Source Complete, Communication & Mass Media Complete (EBSCO), SocINDEX) en a) psychologie, psychologie sociale, sciences de l’éducation ; b) neurosciences et médecine (psychiatrie, pédiatrie, santé publique), c) sciences de la communication et marketing et sur Google Scholar4.
Les auteurs décrivent ici le cadre de leur approche qui est pluridisciplinaire ainsi que les principales sources utilisées.
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